Une émotion non accueillie peut devenir douloureuse. Plus j’accueille mes émotions, moins j’en suis prisonnier.
Les motifs de consultation d’un psychologue sont divers mais, chez l’enfant comme chez l’adulte, c’est souvent un trop plein émotionnel qui pousse à franchir le pas. Quelque chose ne va pas et cela se traduit par une colère ou une tristesse qu’on ne parvient plus à contenir. Exprimer cela chez le psychologue est une bonne idée pour faire le tri et avancer.
Mais est-il possible d’éviter ces trop-pleins émotionnels ?
Voici quelques pistes préventives à explorer…
Piste #1: Accueillir plutôt que gérer ses émotions.
Gérer implique une forme de contrôle des émotions. C’est une notion à laquelle il est intéressant de réfléchir. Souvent, en consultation les patients sont étonnés quand je leur parle de l’importance des émotions pour leur bien-être psychologique.
Il est fréquent de constater que beaucoup rentrent leurs émotions. Elles sont mises sous le tapis, en quelque sorte, parce que trop douloureuses ou effrayantes. Parfois, les patients ne pensent même pas leur état en termes d’émotions.
Ce n’est que lorsqu’ils craquent au niveau émotionnel, quand le trop plein d’émotions atteint son paroxysme, qu’ils prennent conscience de l’impact des émotions sur leur vie.
Accueillir ses émotions, c’est prendre conscience qu’elles existent et qu’elles jouent un rôle important dans nos vies. Valider leur existence c’est une manière de ne pas s’oublier en chemin et parfois d’éviter d’atteindre le trop plein.
Piste #2: Réguler les émotions plutôt que les contrôler.
Chercher à contrôler ses émotions sans en connaître la teneur est un leurre. C’est une autre manière de mettre les choses que l’on ressent sous le tapis.
Rester sourd à ses propres émotions en les taisant est la meilleure façon de leur permettre de ressortir plus fort et de manière plus destructrice.
La régulation de ses émotions n’est possible que si on les accueille au préalable. Réguler ses émotions consiste à les connaître en les identifiant. Quand elles sont identifiées, il est possible de les canaliser pour atteindre un équilibre petit à petit.
La capacité à réguler ses émotions est le fruit d’un apprentissage que tout le monde n’a pas eu la possibilité de faire durant l’enfance ou l’adolescence. Le débordement émotionnel, indépendamment de l’histoire et des traumas éventuels, vient de ce déficit d’apprentissage à réguler les émotions.
Voici un conseil que je donne souvent aux patients : Se connecter au corps aide à réguler les émotions.
On ressent les émotions avant tout dans notre corps. Se connecter au corps est utile pour éviter qu’elles nous surchargent et nous envahissent.
Comment ?
Deux axes :
- On s’aide du corps et en particulier de ses tensions pour repérer leurs émotions.
- Les activités telles que le sport, la relaxation, la méditation ou parfois une simple balade dans la nature peuvent aider à repérer et accueillir ses émotions. On prend l’habitude de les ressentir et surtout lâcher prise.
Piste #3: Ne pas juger ses émotions. Comprendre leur lien avec les besoins.
Dans l’absolu, il n’y a pas de bonnes et de mauvaises émotions. Et pourtant, c’est ainsi que nous avons tendance à les classer.
Classer les émotions qu’on ressent est une manière de se juger soi-même. C’est un processus normal mais il faut en prendre conscience pour s’en distancer.
Les émotions nous disent quelque chose sur nous et nos besoins. Elles représentent une sorte de curseur qui nous indique où nous en sommes. Elles pointent une direction vers laquelle on peut aller ou de laquelle il faut s’éloigner.
Être à l’écoute de ses émotions c’est in fine savoir ce qui nous fait du bien et ce qui ne nous en fait pas. C’est ouvrir subtilement la possibilité d’agir petit à petit en fonction des émotions qu’on ressent.
Que se passe-t’il quand on réprime nos émotions trop longtemps?
Une émotion non accueillie a le potentiel pour se transformer en état. Une tristesse ou une colère qui s’installe et dure dans le temps peut devenir un état douloureux. Au final, cela impacte non seulement l’humeur mais aussi les relations de l’individu, de son cercle privé à ses relations professionnelles.
L’émergence de cet état peut être plus ou moins long. Par exemple, dans le cas d’un deuil, l’accueil des émotions est généralement long.
Quoiqu’il en soit, c’est un signal d’alerte auquel prêter attention.
La répression émotionnelle peut conduire à vivre à côté de soi et de ce que l’on ressent. L’accumulation d’émotions devient une vraie source de souffrance psychologique si on ne les comprend pas. Le risque est alors de ne plus respecter ses propres besoins. C’est ce qui conduit à l’explosion.
Pour avoir l’esprit plus clair avant d’atteindre le stade de l’invivable, voici une bonne manière de faire le tri dans ce que l’on ressent, pense et vit.
Si dire « je ne suis pas mon émotion » permet de prendre du recul.
En pratique, il faut verbaliser son émotion. Quelque chose nous traverse. On fait un pas de côté par rapport à son émotion et on verbalise :
- Je suis triste.
- Je me sens triste.
- Il y a une partie de moi qui se sent triste.
- J’observe qu’une partie de moi se sent triste.
À voix haute ou en pensée, verbaliser ses émotions de tristesse, de colère ou même de joie permet de ressentir les choses sans être complètement absorbé par l’émotion. C’est le même principe que pour les pensées obsédantes ou les ruminations. Verbaliser permet de rester à distance tout en sachant ce que l’on ressent.
Comment décharger sa colère pour mieux accueillir l’émotion ?
La colère contrairement à la tristesse s’accompagne d’une énergie. Décharger cette énergie peut aider à la prise de recul nécessaire pour accueillir l’émotion.
Taper sur un coussin, crier ou dire un gros mots sont autant de bons moyens de décharger la colère.
Conseil pratique : choisissez des surfaces molles (si vous choisissez l’action physique) et faites ça seul, dans votre coin. Il ne faudrait pas vous blesser, ni inquiéter vos proches inutilement.
Concrètement, quand vous déchargez la colère, vous laissez l’émotion vous traverser. Sans entrave vous pouvez ainsi accueillir et accepter cette émotion.
Moins j’accueille mes émotions, plus j’en suis prisonnier.
Plus j’accueille mes émotions, moins j’en suis prisonnier.
Se libérer de cette « prison » nous permet de voir les choses avec plus de clarté et ouvre la possibilité de comprendre les besoins cachés derrière les émotions. On peut même parler de libération émotionnelle.
Dans une bonne régulation, on vit un peu toutes les émotions.
Il y a tout de même parfois des situations dans lesquelles les quelques pistes et idées développées dans cet article ne suffiront pas.
Quand a-t-on besoin de thérapie pour accueillir ses émotions?
Un signe qui ne trompe pas : les émotions tournent en boucle et rien de ce que vous mettez en place ne parvient à les arrêter.
C’est souvent à l’occasion d’évènements difficiles ou d’un état de choc que cela se manifeste.
- On est mis à mal sur le plan personnel et/ou psychologique.
- On ne parvient plus à gérer les choses.
- Le curseur nous indique alors qu’on n’en peut plus, qu’on est débordé.
- Notre comportement change et ça nous déplait.
- Parfois on en souffre.
- On ne sait plus ce qu’on veut.
- On ne sait plus quoi faire.
Ce sont quelques signes qui vous indiquent qu’un travail sur les émotions et les ressentis est peut-être nécessaire pour prendre de la distance avec ses émotions, mieux les comprendre et les réguler.